"Ambition pour des forêts vivantes en Ile-de-France" FNE-IDF
Mise à jour : 23 août 2024
L'état de santé des forêts en Ile-de-France se dégrade. Comme partout en France, les forêts sont morcelées par l'urbanisation et fragilisées par le changement climatique. Dans les forêts publiques franciliennes très fréquentées, la pression des coupes accentue encore plus leur vulnérabilité.
A l’initiative de France Nature Ile-de-France, les acteurs franciliens de la forêt ont été réunis en juin 2023 Pour la survie des forêts franciliennes. En mai 2024, le texte «Ambition pour des forêts vivantes en IdF » a été publié.
Ce texte présente une perspective visant à améliorer la gestion des forêts en IDF et invite à poursuivre les réflexions. Cependant, il accorde une priorité à la production de bois, devant les autres fonctions de la forêt, notamment les fonctions écosystémiques.
Les points forts de l’accord entre les associations et les professionnels de la forêt sont :
Protéger les écosystèmes forestiers et améliorer leur fonctionnalité, diversifier les peuplements et les zones protégées pour la biodiversité, encourager une gestion adaptée aux évolutions des peuplements.
Les points à améliorer sont :
Augmenter les mesures de protection pour la biodiversité et la protection des sols [1]
Les associations rappellent que la gestion durable des forêts ne peut se limiter à des considérations économiques. D’autant plus que la valeur des arbres dépend de la qualité du sol, ainsi que de la biodiversité des végétaux, des insectes et des animaux. C’est pourquoi, la conservation de gros bois mort, le maintien des vieux bois, la diversification des peuplements de gros bois, les micro-habitats et les îlots de sénescence, ainsi que les continuités écologiques sont essentiels.
Plus une forêt vieillit, plus elle capte de carbone et plus elle abrite de biodiversité.
Diminuer la pression des coupes [2]
Il est essentiel d'allonger les cycles d’exploitation plutôt que de les raccourcir, en réduisant significativement les coupes, car nos forêts sont trop jeunes pour résister au changement climatique.
L'Art.L.122-2 du code forestier précise que dans les forêts à forte fréquentation, la préservation et l'amélioration du cadre de vie des populations constituent une priorité. Par conséquent, le document d'aménagement doit tenir compte de ces objectifs. Notamment, le taux d’exploitation des forêts urbaines et périurbaines à forte fréquentation, en particulier celles de la petite couronne, doit rester inférieur à celui de la moyenne des forêts de l’hexagone, qui est de 61% selon les données de l'IGN pour la période 2010-2018.
Favoriser la libre évolution [3]
Une forêt en libre évolution favorise le développement d'une biodiversité riche, laquelle résiste mieux aux modifications climatiques. En 2020, la Stratégie Nationale pour les Aires Protégées affichait comme objectif de placer 10% du territoire sous protection forte (ilots de sénescences, parcelles en libre évolution, réserves intégrales…).. Dans le contrat ONF-État 2021-2025, l’Office s'y est engagé. Il reste la moitié du chemin à faire.
Trouver d'autres financements pour les forêts publiques [4]
Les forêts urbaines et périurbaines jouent un rôle déterminant dans l'amélioration de la résilience des villes au changement climatique. Elles offrent également de nombreux services non marchands aux Franciliens. La contractualisation de ces services offrirait plus de moyens financiers à l'ONF, lui permettant de couper moins de bois pour s'autofinancer et de redevenir un acteur majeur au service de la forêt, dans des missions d'intérêt général visant à assurer la protection et la conservation à long terme des forêts.
Le chauffage au bois est la première source de pollution en Île-de-France [5]
Souvent perçu à tort comme une énergie décarbonée, le chauffage au bois émet deux fois plus de CO2 que le gaz naturel et constitue la principale source d’émissions de particules fines PM2.5, responsables de 6 000 décès prématurés chaque année en IDF (source : Santé Publique France).
La reconstitution de la forêt et sa capacité à absorber le carbone émis lors de la combustion prennent plusieurs années, entre 50 à 80 ans, voire plus.
Les alertes répétées des scientifiques concernant l’accélération climatique, avec un risque d’emballement, et l'affaiblissement de moitié du puits de carbone forestier en une décennie, doivent inciter à augmenter cette capacité de stockage dans nos forêts plutôt qu’à la déstocker. En raison de ses impacts négatifs sur la santé et l'environnement, l’usage du bois comme source d’énergie ne doit pas être encouragé.
Parmi nos propositions
- Notre Plaidoyer pour les forêts publiques d’Ile-de-France : Plaidoyer
- L"Ambition" pour toutes les forêts d’Ile-de-France quelles qu’elles soient : nos 10 mesures
Sophie Durin, présidente Les Amis du Bois de Verrières
Jean-Claude Marcus, président de l’Université Populaire pour la Biosphère
Jean-Claude Denard, association Chaville Environnement
Louis Vallin, Vice-président de l'association ARBRES
Pour en savoir plus
[1] Le principe selon lequel la forêt doit être exploitée pour se régénérer était justifiée lorsque les conditions climatiques étaient favorables et la croissance des arbres plus rapide. Aujourd’hui, « produire plus de bois tout en préservant la biodiversité » est révolu.
Le bois est une ressource renouvelable, à condition que les récoltes ne dépassent pas la capacité de régénération de la forêt. Les associations ont mis en évidence, que le taux de prélèvement de bois en forêts domaniales représente 96 % de leur accroissement biologique, sur les 3 derniers inventaires forestiers de l'IGN (2016-2022) : https://www.sauvegardeforets-idf.org/pour-une-gestion-equilibree-des-forets-domaniales. Ces prélèvements conduisent légitimement les associations à s'alarmer sur l'avenir des forêts publiques. L’écosystème pourrait ne pas être en mesure de se renouveler, un risque aggravé par le changement climatique.
[2] Les forêts abritent une biodiversité riche et variée, mais leur existence est menacée par la dégradation de leur habitat. Diminuer la pression des coupes de bois permettrait de réduire la mécanisation lourde, de préserver la structure des sols et de laisser les arbres vieillir davantage avant d'être abattus.
Les coupes rases doivent relever seulement d'une décision de dernier recours, et être réduites au minimum incompressible. Les coupes rases par anticipation, dès lors que 20% des arbres sont qualifiés « vulnérables », « dépérissants » et « pauvres » sont à proscrire. Ce seuil qualifiant qu'une parcelle est sinistrée est trop bas et condamne des forêts qui pourraient au contraire s'adapter et ne pas mourir.
La superficie forestière en Île-de-France ne suffit pas à évaluer l’état de santé des forêts. En raison du changement climatique, elles connaissent une baisse inquiétante de leur croissance. Ce qui compte, c'est le volume de bois vivant : plus une forêt vieillit, plus elle capture de carbone et favorise la biodiversité. Or, la forêt française est jeune : 80% des arbres ont moins de 100 ans (65 ans selon l'IGN). En Île-de-France, le volume moyen de bois vivant est de 193 m³/ha (173 m³/ha en France), l'un des plus faibles d'Europe tempérée, et deux fois moins qu'en Allemagne.
Article L212-2 du Code forestier : Le document d'aménagement, établi conformément aux directives et schémas régionaux mentionnés à l'article L. 122-2, prend en compte les objectifs de gestion durable, notamment la contribution actuelle et potentielle de la forêt à l'équilibre des fonctions écologique, économique et sociale du territoire où elle se situe, ainsi que les caractéristiques des bassins d'approvisionnement des industries du bois.
Dans les forêts soumises à une forte fréquentation du public, la préservation et l'amélioration du cadre de vie des populations constituent une priorité.
Il fixe l'assiette des coupes.
L'arrêté d'aménagement peut, pour certaines zones, interdire ou soumettre à des conditions particulières les activités susceptibles de compromettre la réalisation des objectifs de l'aménagement.
[3] L’ONF s'est engagé à développer un réseau de protection forte au sein des forêts domaniales, soit 10% en ha cumulés d'ici 2025 (contrat ONF-État 2021-2025). Sur les 72 500 hectares des forêts domaniales, seulement 5,72% de leur surface est consacrée aux Réserves biologiques :
- 1 350 ha de Réserves biologiques intégrales (RBI) dont 1 060 ha sur l'ensemble du massif forestier de Fontainebleau et les Trois Pignons, 42 ha à Verrières soit 1 ,86% de leur surface. www.onf.fr/onf/actualites-corse/+/204e::les-reserves-biologiques-integrales-du-massif-de-fontainebleau-etudiees-la-loupe.html
- 2 803 ha de Réserves biologiques dirigées (RBD) dont 1 300 ha à Fontainebleau et aux Trois Pignons, 1 152 ha à Rambouillet, 176 ha à Montmorency soit 3,86%. https://driaaf.ile-de-france.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/PRFB_VF__sans_annexes__cle0fcbc3.pdf
[4] La valeur économique de la fonction récréative d’une forêt urbaine est sans doute l’une des plus étudiées. Elle peut ouvrir la voie à diverses questions ou initiatives tenant compte des préoccupations sociales et environnementales : accès à des espaces naturels en bon état de conservation, préservation de la biodiversité, maintien du patrimoine naturel, meilleure protection de la ressource en eau, et séquestration du carbone. Obtenir des financements en valorisant les services non marchands fournis par la forêt reviendrait à envisager une forme de compensation.
[5] Faut-il continuer à couper nos arbres pour les brûler ? de Jacques Laskar président de C3pi et membre de l'Académie des Sciences : https://www.sauvegardeforets-idf.org/le-chauffage-au-bois-premiere-source-de-pollution-en-ile-de-france-jacques-laskar
POUR ALLER PLUS LOIN ...
Plaidoyer pour Sauvegarder les forêts publiques d'Ile-de-France
La forêt publique est un patrimoine commun, nous devons la préserver. Ensemble, exigeons des mesures concrètes pour la sauvegarder. Ensemble, signons le plaidoyer !